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Dans cette session de notre rubrique Portrait d’une Valléenne, nous recevons Justa Gabriel, une digne fille authentique, héritière d’une histoire familiale marquée par la résilience et une passion inébranlable pour la culture et la communauté.

Racines familiales

Née un 30 août, une nuit d’été, à la Vallée de Jacmel, plus précisément dans la localité de Tuff, section communale de Ternier, Justa Gabriel est la cadette d’une fratrie nombreuse de dix enfants. Elle est l’enfant d’un père cultivateur, Antoine Gabriel, et d’une mère vaillante, Benita Antilhomme, commerçante originaire de Morne à Brûler. Son enfance, comme elle aime à le rappeler, fut à la fois joyeuse et exigeante, bercée par la chaleur d’une famille nombreuse, mais également marquée par les rigueurs de la vie quotidienne. « Nous étions nombreux, mais nos parents créaient toujours un environnement favorable à notre épanouissement. Ils nous ont transmis des valeurs morales fortes, l’importance de la responsabilité et la nécessité d’avoir de l’empathie », confie-t-elle. C’est dans ce terreau familial que s’est façonné son caractère, empreint de discipline, de courage et d’une curiosité insatiable pour le monde qui l’entourait.

Enfance marquante

Parmi les souvenirs les plus marquants de son enfance, elle évoque ces voyages à dos d’âne en compagnie de sa mère, qui transportait du maïs moulu à vendre au marché de Trouin. « À sept ou huit ans, parcourir Morne à Brûler n’était pas une corvée. C’était une nécessité, une pratique courante qui assurait la survie de la famille », raconte-t-elle avec une tendresse mêlée de fierté. Ces expériences, faites de fatigue et de complicité, lui ont appris le sens de l’effort et de la solidarité. D’autres moments, heureux ou difficiles, rythmés par les transmissions culturelles et les traditions familiales, ont forgé en elle une identité solide et une résilience qui allait devenir la marque de sa personnalité.

Études supérieures

Son parcours académique témoigne de cette soif constante d’apprendre. Élève appliquée, Justa effectue sa scolarité primaire à l’école Saint-Paul de la Vallée, dirigée par les Filles de Marie, avant de poursuivre ses études secondaires au Collège et Lycée Louis Joseph Janvier de Carrefour, jusqu’à la philosophie. Après l’obtention de son brevet, les options se multiplient, mais Justa choisit résolument la voie des études supérieures. « L’amour de l’apprentissage et la découverte m’ont poussée à poursuivre des études universitaires », affirme-t-elle. Elle intègre alors l’Institut Universitaire Quisqueya Amérique (INUQUA), où elle se spécialise en sciences informatiques et communication, un domaine qui stimule sa créativité et son indépendance d’esprit. Actuellement en troisième année de gestion et économie à l’Institut Universitaire des Sciences (IUS) de Jacmel, elle ne cesse de se former parallèlement en journalisme culturel, en techniques de présentation télévisée, en montage vidéo et en réalisation de documentaires, convaincue que la formation continue est la clef de la progression personnelle et professionnelle.

Expérience télévisuelle

La carrière de Justa Gabriel prend un tournant décisif en août 2003 lorsqu’elle intègre l’équipe de Canal 11 –Télévision Kay Timoun –. Elle y consacre dix-sept années de sa vie à la production et à la valorisation du patrimoine haïtien à travers l’émission 11 Chanpèt, qui mettait en lumière les potentialités des villes de province. « Cette expérience a été la plus enrichissante de ma vie professionnelle. J’y ai appris à relever des défis énormes, à travailler en équipe et à comprendre les différentes étapes d’un projet », confie-t-elle. Cette aventure télévisuelle lui a permis de parcourir tout le pays, de visiter ses sites historiques et touristiques, et d’enrichir sa vision du développement communautaire tout en aiguisant ses compétences journalistiques. De cette expérience unique, elle garde la conviction que la culture est un levier essentiel pour valoriser et faire rayonner Haïti, au-delà des préjugés et des difficultés.

Engagement social

Revenue dans sa ville natale, Justa continue aujourd’hui son engagement en tant qu’activiste sociale. Pour elle, renouer avec le passé, observer le présent et réfléchir à l’avenir constitue une mission aussi personnelle que collective. Elle s’investit dans des activités communautaires, persuadée que chaque petite action contribue au bien-être collectif et à la renaissance de son terroir. Ses loisirs, loin d’être anecdotiques, nourrissent son équilibre intérieur : elle affectionne les excursions, sources de détente et d’apprentissage, mais aussi le sport, dont elle apprécie les bienfaits sur la santé physique et mentale. « Regarder un match de football ou de basketball, c’est pour moi un moment agréable, un lien social qui renforce le sentiment d’appartenance », explique avec enthousiasme la Coordonnatrice de l'Amicale des anciens élèves de l'école Saint-Paul, Les Filles de Marie, son alma mater.

Sources d’inspiration

Justa Gabriel se nourrit également des modèles qui l’ont précédée. Elle admire les héroïnes de l’histoire haïtienne comme Marie-Jeanne, Sanité Bélair ou Claire Heureuse, dont le courage et le sacrifice continuent de l’inspirer. Plus récemment, elle trouve une source de motivation chez des femmes contemporaines comme l’historienne Bayyinah Bello ou encore chez des figures médiatiques telles qu’une ancienne journaliste de la TNH, Magalie Montreuil, qui portait haut la voix de la culture. « Depuis mon jeune âge, j’avais ce désir incessant de rechercher la vérité, d’explorer des histoires inédites. Cette curiosité m’a toujours poussée à poser des questions et à approfondir les angles que d’autres auraient négligés », souligne la Tuffoise.

Défis persistants

Comme beaucoup de femmes haïtiennes, la Valléenne doit cependant composer avec des défis multiples : concilier vie professionnelle et responsabilités familiales, affronter les inégalités persistantes de genre et supporter la pression sociale de réussir sur tous les plans. Elle en parle avec lucidité mais sans amertume : « J’ai appris à développer ma résilience, à accepter l’inconfort du changement et à rester concentrée sur mes objectifs. Je n’abandonne pas facilement. » Cette attitude positive, alliée à un optimisme naturel, lui permet d’aller de l’avant malgré les obstacles, en cultivant la persévérance comme une arme essentielle contre les stéréotypes et les limitations sociales.

Plus belle réalisation

Sa plus grande réalisation demeure son expérience journalistique de dix-sept ans au sein de Canal 11, qui lui a offert le privilège de découvrir Haïti dans toute sa richesse culturelle et naturelle. « J’ai parcouru les villes du pays, contemplé nos paysages incroyables, exploré nos sites historiques et touristiques. Contrairement à ce qu’on dit parfois, Haïti a tant à offrir », affirme-t-elle avec conviction. Ce long périple professionnel, au carrefour de la culture et de la communication, lui a permis d’inscrire son nom dans l’histoire des passeuses de mémoire, celles qui s’emploient à faire émerger une autre image du pays, faite de beauté, de résilience et de fierté.

Préparé par : James Louis-Jean

Traité et édité par : Bélizaire Raphaël belizaire30@yahoo.fr

Jean Dupont